Témoignages de personnes ayant été victimes

Découvrez plusieurs témoignages vidéo et audio (La 3e personne) de personnes ayant bénéficié de nos services.

Réparer l’irréparable

Au moment d’écrire ce témoignage, cela fait exactement 4 mois que j’ai vécu ce processus. Je suis en attente de la 3e étape : le bilan. Il se fera par Visio conférence vue ma condition de santé à cette période-ci versus la route à faire. Ce sera une première dans l’histoire de la justice réparatrice au Québec, depuis 18 ans. Vous vous posez certainement la question suivante : Comment vais-je depuis?

Très bien. Mieux que je n’aurais pu l’espérer. Une chose très surprenante est arrivée, il y a eu intégration de plusieurs personnalités. Je me sens UNE. Je me sens centrée, en un morceau. Je ne sais pas si je peux affirmer que c’est complet, peut-être me reste-t-il des morceaux à rapiécer, mais la différence est majeure! Je continue mon cheminement et ma thérapie en neuropsychologie et à consulter mon travailleur social qui me suit depuis 8 ans. Je continue à prendre soin de moi, à créer et m’impliquer dans des projets porteurs de changements sociaux. Mon entourage est impressionné par ma sérénité, ma patience et ma compassion. Je ne croyais pas que les fruits récoltés seraient si nombreux. Je vis un profond sentiment de gratitude.

Réparer l’irréparable : lire le témoignage complet d’Aki.


Un coeur à coeur

Je portais ce cœur en douleurs
Avec ses égratignures et ses peurs
Au visage peiné, rapiécé.
Et je me suis retrouvée face à eux qui avaient blessé.
Au début j’avais encore peur mais peu à peu j’ai vu le leur, leur cœur.
Il y avait eux,
Il y avait moi,
Leur vie, la mienne.
Je n’y voyais plus qu’une «grosse peine».
Dans ce grand brouillard, un jet de lumière s’est amené.
Un lien s’est créé,
Un mur est tombé,
Quelque chose s’est transformé.
Ma peur, ma révolte, ma peine s’est apaisée.
Une réconciliation tranquillement s’est installée.
Cette expérience m’a guérie de l’intérieur et m’a menée ailleurs.
Vers l’espérance d’une vie
Voire même d’un monde meilleur.

O. ST-J


Témoignage de Chantal

Durant mon enfance j’ai été victime d’agressions sexuelles d’un membre de ma famille de l’âge d’environ 4 ans à 12 ans, les souvenirs des âges ne sont pas exacts car mon cerveau a isolé les événements et les a enfouis très loin jusqu’à ce qu’ils refassent surface il y a 3 ans.

A ce moment-là, j’ai consulté et c’est ce qui m’a amené à faire plusieurs démarches et thérapie.  A travers les démarches il y a eu des gens sur mon passage qui m’ont fait un énorme bien.  J’ai eu le privilège d’entendre leurs propres témoignages, dont un très particulier celui d’un ex-détenu qui m’a partagé son histoire. Elle est différente de la mienne mais ce qui est venu me chercher dans son témoignage c’est lorsqu’il a parlé de la prison intérieure… il a dit et je le cite  » la prison intérieure n’est pas différente de celle du pénitencier, la seule différence ce sont les barreaux ».   Et il a aussi parlé de la justice réparatrice et tout de suite j’ai su que cette démarche serait la boucle sur toute mon histoire et que je sortirais finalement de cette prison.

Mon ami, et oui ce charmant ex détenu compte énormément pour moi maintenant et je le considère beaucoup, c’est lui qui avait la clé pour me laisser sortir de ma prison.

Après une conversation il m’a expliqué ce qu’était la justice réparatrice et il m’a fortement suggéré d’appeler au CSJR et c’est ce que j’ai fait. Deux jours plus tard j’avais ma rencontre avec Estelle au CSJR.  Wow une femme merveilleuse, un cœur sur deux pattes avec une très belle écoute.  Nous avons déterminé ensemble que j’étais prête pour une rencontre.

Le 10 novembre est arrivé et j’ai eu ma rencontre face-à-face détenu/victime au pénitencier de la Montée Saint-François. Cette rencontre m’a permis de boucler la boucle sur toutes mes démarches. Cette rencontre a été magique, elle s’est déroulée dans l’amour, la compréhension, l’écoute, l’honnêteté, le respect, la douceur… Pour la première fois un agresseur du même type que mon agresseur, m’a dit que je ne suis pas responsable et que je n’ai pas à avoir honte et que c’est lui qui est responsable…. Wow quelle libération!

Je souhaite sincèrement pour quelqu’un qui a été victime d’un acte criminel d’avoir le courage de faire cette démarche. Moi-même je n’aurais jamais pensé me rendre dans un pénitencier pour parler avec quelqu’un qui a posé les mêmes gestes qui ont volé mon enfance, mon adolescence, ma vie adulte, ma vie ….

Aujourd’hui je peux vous assurer que mon opinion a vraiment changé sur mon agresseur et je comprends tellement mieux maintenant comment il en est arrivé là.  Cette personne a su m’expliquer qu’est-ce qui se passe dans sa tête ses émotions.

Merci Monsieur X pour ta générosité et d’avoir eu le courage et la force de cheminer comme moi je l’ai fait, tu as été la boucle sur le nouveau cadeau que la vie m’offre aujourd’hui.

Très sincèrement Merci Monsieur X

Encore une fois merci…
Une ex-victime … Maintenant une survivante!!


Témoignage de Pieret

Depuis mon enfance, j’ai vécu de nombreuses souffrances car j’ai été victime d’inceste et de viol et ensuite d’agressions. J’avais peur des autres et je me sentais coupable. Pendant des années, j’ai suivi des thérapies car je voulais comprendre et je cherchais à me connaître.

Au printemps 2010 j’ai participé à des rencontres détenus-victimes et ma vie a basculé. La justice réparatrice m’a permis de confronter des personnes qui avaient posé des actes semblables à ce que j’avais subis. Ils t’écoutent et tu les écoutes. J’ai compris comment ils ont été conduits à agir de cette manière et ce qu’ils ont vécu à ce moment-là. Ce processus m’a permis d’arrêter de juger les autres, de me culpabiliser et d’avoir peur.

J’ai de nouveau espoir. Depuis, le cheminement continu à faire sa route intérieurement. J’essaie de garder cette paix qui m’habite maintenant depuis cette expérience.


Témoignage de Carole, victime d’inceste

En thérapie individuelle, il me semblait avoir fait le tour de la question des abus sexuels subis dans mon enfance. Malgré toutes ces démarches, je gardais en moi les sentiments de honte et de culpabilité.

En 2009 j’ai accepté, après avoir lu un article dans une revue, de participer à des rencontres *RDV*. Pendant quelques semaines j’ai eu l’opportunité de partager avec d’autres les émotions, les sensations et les états d’âme profondément enfouis en moi. Je ne me sentais plus seule. D’autres ayant vécu des situations similaires témoignaient par un discours semblable. Ces échanges m’ont permis de cesser d’avoir peur de ce que je ressentais. Je me sentais normale! La confusion s’estompait.

Là où le flot d’énergie a surgi c’est lorsqu’un abuseur a admis devant nous qu’il était le seul et unique responsable des gestes qu’il avait posé. C’est dans un torrent de larmes que mes tensions se sont relâchées. Enfin la vérité était dite. Il y avait si longtemps que j’attendais ce moment. Même si la personne n’était pas mon propre abuseur ce fut pour moi le baume sur la plaie restée béante.

J’ai aussi eu l’occasion de parler de ma colère, de mes peurs et de mes rancunes. Dire comment une satisfaction de quelques secondes peut marquer à tout jamais la vie de l’autre. Tout ça dans un endroit sécuritaire et merveilleusement bien supervisé. Par moment le soutien des intervenants m’a permis de réaliser combien ce même soutien avait fait défaut lors des évènements de mon enfance.

Depuis ces rencontres je ne cesse de tirer des bénéfices positifs dans ma vie. Je me traite avec beaucoup plus de respect. C’est comme si je m’étais pardonnée d’avoir été victime d’un adulte. Je m’accueille avec tellement plus d’amour. Je reprends le pouvoir sur ma vie. Je me sens nettoyée d’un lourd fardeau. J’ai cessé de me demander ce que j’avais bien pu faire pour attirer cette situation.

Je constate aussi qu’il est important d’exprimer à l’abuseur ce que nous avons subi pour ne pas qu’il recommence. En même temps il est aussi important qu’il se pardonne car s’il se considère comme un moins que rien il agira ainsi.


Témoignage de Carole, mère d’un jeune assassiné

Ma thérapeute, qui connaissait mon désir de tout faire pour ma guérison et de sortir de la victimisation, m’a présenté un dépliant traitant de rencontres entre détenus et victimes (RDV) offertes par le Centre de services de justice réparatrice. Ces rencontres m’ont offert une occasion de m’exprimer librement. Elles ont favorisé des deux côtés une prise de conscience de l’impact qu’a eu sur moi le meurtre de mon enfant, et la libération des émotions destructrices. Elles ont aidé à une compréhension mutuelle du vécu des détenus et des victimes, et à l’abandon des préjugés.

J’étais convaincue à la première rencontre que cette démarche serait bénéfique. Je ne me suis pas trompée. Chaque participant a été très respectueux des sentiments exprimés et une grande compassion a plané sur le groupe durant ces six semaines de rencontres.

J’étais nerveuse, je ne savais pas à quoi m’attendre, ni quelle serait ma réaction étant face à quatre hommes jugés coupables d’homicide. À mon grand étonnement, ces hommes étaient profondément bouleversés de rencontrer des victimes d’acte criminel et d’écouter mon vécu qui leur démontrait les conséquences du geste qu’ils avaient posé. J’y ai vécu un échange de perceptions des événements qui nous rassemblaient. Ma croyance est que nous sommes tous interactifs en tant qu’humains, une parole ou un regard peut nous amener plus loin dans notre développement personnel. L’expression de mon vécu m’a redonné ma dignité, je pouvais enfin parler directement à des gens qui avaient causé chez d’autres personnes un geste irrecevable. J’y ai découvert mon ouverture d’esprit face à tous les humains, quel qu’ils soient, et mon désir de laisser une chance au coureur.

Je crois que tout auteur d’acte criminel doit être arrêté dans sa façon d’agir : ce qui peut provoquer chez lui une prise de conscience. Ensuite, s’il a le désir sincère de se réhabiliter, il devrait avoir droit à une deuxième chance. (…)

La justice réparatrice fait partie de mon cheminement thérapeutique et j’ai participé à un RDV avant tout pour mon bien-être pour aller au bout de moi. Les quatre détenus rencontrés sont en démarche depuis leur incarcération et sérieux dans leur désir de réhabilitation. À mon avis, détenus, comme victimes, nous avons été affectés par un même geste extrême. Nous avons un même cheminement à faire pour nous en sortir, soit toucher le fond du baril puis en émerger en se pardonnant et se faisant réparation à soi-même.


Autres brefs témoignages :

« On se disait tout le temps : « ils vont revenir, ils vont revenir. » »
– P., victime de cambriolage

« On m’a volé ma sécurité et celle de mes enfants. »
– A, victime de hold-up et d’un viol

« Aussi incroyable que cela puisse paraître, je cherchais ma faute dans l’événement malheureux »
– J., victime d’inceste

« C’est un vieux verre, c’était le verre que ma mère buvait dedans, en plastique parce qu’elle échappait tout. Pour moi c’était précieux. C’est comme le jonc. Ils m’ont enlevé ma mère. »
– P., victime de cambriolage

« Je suis convaincu que la rencontre avec une personne qui nous a blessée – ou qui a commis un geste semblable – est assurément une étape importante (si possible) d’un processus de guérison. »
– R., victime indirecte du meurtre de sa mère

« La volonté d’aller jusqu’au bout permet d’assister à quelque chose d’extraordinaire : une ouverture insoupçonnée, une empathie à la souffrance humaine même si celle-ci est ressentie par un agresseur. Dès lors, l’agresseur n’est plus une bête, un monstre, un démon, il devient humain. »
– J., victime d’inceste

« J’ai pu être tout à fait humaine, avec mes émotions tant négatives que positives. En exprimant aux détenus ma colère d’avoir été victime de cambriolage à plusieurs reprises, j’ai trouvé que le pardon ne peut venir sans être précédé par l’honnêteté. »
– P., victime de vol par effraction

« C’est la première fois depuis 36 ans que je parle de ce qui m’est arrivé. Je n’aurais jamais cru que cela soit possible. Cela me prenait toujours à la gorge. »
– G. victime d’inceste

« On avait des barreaux qui étaient pas nécessairement les mêmes, mais tous les deux on avait des barreaux. Les RDV ont permis de le réaliser chacun de notre côté…Autant la victime dépersonnalise le détenu que le détenu dépersonnalise la victime. »
– Lise, victime de holdup

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